Président de Cash Express, Roger Beille est à la tête d’une franchise de plus de 100 magasins en France et en Europe qui surfe sur le succès des produits d’occasion. Avec une hausse d’activités de 29% à l’approche des fêtes de Noël, il revient avec nous sur le développement du marché de la deuxième main.
TLB : Le marché de l’occasion se développe-t-il de manière significative à l’approche de Noël ?
Roger Beille : Oui, et cela fait maintenant plusieurs années que c’est le cas. En 2012, à l’approche des fêtes, nous avons connu une hausse de 29% de la fréquentation dans l’ensemble de nos magasins. A la fois des gens qui venaient vendre des produits, et d’autres qui venaient acheter des cadeaux d’occasion. Face à cette croissance d’activité nos magasins doivent s’adapter, il nous faut renforcer nos effectifs et parfois ouvrir le dimanche.
TLB : Acheter un produit d’occasion et même l’offrir ne fait donc plus peur aux consommateurs ?
R.B. : Non, et cela fait déjà quelques années que nous voyons les comportements des consommateurs évoluer. Notre métier c’est avant tout de rassurer nos clients sur la qualité de nos produits. Nous offrons donc une garantie et la possibilité de voir et d’essayer ce qui est en vente. Et grâce à cette relation de confiance, notre activité ne cesse de se développer. Parce que cela permet pour le même budget d’accéder à des produits censés être plus chers comme les nouvelles technologies ou d’acheter plus pour le même prix.
TLB : L’achat d’occasion doit donc être vu comme un moyen de consommer plus ?
R.B. : Je préfère parler de consommation plus intelligente. Les gens qui rentrent dans nos magasins ne sont pas dans le besoin. Ce sont plutôt des consommateurs issus de catégories sociaux-professionnelles moyennes voire supérieures et qui viennent pour se débarrasser de choses dont ils n’ont plus envie ou qu’ils n’utilisent plus et qui ensuite achètent dans nos magasins pour se faire plaisirs et non pas par nécessité. Ces gens là ne voient que le pouvoir d’achat supplémentaire que l’occasion leur offre. Ils veulent vraiment se faire plaisir, en achetant plus avec un budget équivalent. Les gens en grosse difficulté sont finalement peu nombreux puisque souvent ils n’ont rien à vendre.
TLB : Quels sont les produits qui se vendent et s’achètent le plus dans vos magasins ?
R.B. : Depuis quelques années le rayon qui se développe le plus c’est celui de la téléphonie mobile. C’est un secteur qui a été boosté par les offres low cost des nouveaux opérateurs comme Free mobile par exemple. Ensuite nous vendons également beaucoup de matériel informatique, surtout depuis l’arrivée des tablettes numériques. Le troisième secteur qui fonctionne très bien, et c’est assez récent c’est la bijouterie et l’horlogerie, avec beaucoup de collectionneurs qui achètent des montres de marques vendues par nos clients.
TLB : Vous avez fait le choix des magasins physiques. Comment vous adaptez-vous à la concurrence de sites de ventes sur internet comme leboncoin.fr par exemple ?
R.B. : Je ne sais pas si nous sommes vraiment en concurrence. Consommer des produits d’occasion n’est pas exactement la même chose. Avec nous, il n’y a pas de mauvaises surprises. Comme je le disais, notre métier c’est de rassurer les clients et de proposer des produits de qualité. Le plus de nos magasins c’est le service, la possibilité de voir, d’essayer et c’est aussi la garantie de trouver un interlocuteur compétent en cas de problème. Évidemment, internet et des sites comme leboncoin ont participé à la démocratisation des produits d’occasion.
TLB : En quoi la crise a-t-elle changé les consommateurs et fait évoluer votre activité ?
R.B. : Cela fait partie des idées reçues de croire que notre activité s’est développée grâce à la crise. Avant la crise, nous avions une croissance à deux chiffres et depuis elle est passée à un chiffre. Encore une fois ce n’est pas un avantage pour nous puisque ceux qui consomment moins n’ont pas de produits à vendre chez nous. Maintenant, il y a un impact psychologique que je ne peux pas nier. En effet, je crois que la situation économique a interpellé les Français sur leur manière de consommer. Il y a un comportement citoyen qui se développe avec l’idée d’acheter de manière plus intelligente et de favoriser le développement durable en achetant des produits d’occasion qui auraient été jetés sinon.
Propos recueillis par Julien Auduc