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« On peut avoir des revenus corrects et des fins de mois difficiles »

Depuis plusieurs années, baisse du pouvoir d’achat et crise économique ont contraint les ménages à arbitrer dans leurs dépenses. Ou à opter pour de nouveaux modes de consommation.

Depuis 2012, le pouvoir d’achat des Français a baissé. Comment se sont-ils adaptés ?

En redéfinissant la hiérarchie de leurs besoins. Ce phénomène, nous l’avons observé de différentes manières, notamment avec la question des arbitrages. On va avoir le sentiment de s’appauvrir, on va donc hiérarchiser ses priorités, sachant qu’il y a plusieurs types de dépenses : d’abord celles dites « contraintes », qui sont une part importante du budget (+0.3% au deuxième trimestre 2013, selon l’Insee) et qui ont tendance à être inflationnistes -essence, loyer, etc.- .

Il y a ensuite les dépenses sur lesquelles on peut arbitrer : celles que l’on veut sauvegarder et les « sacrifiables », qui comprennent les dépenses « plaisir » comme les loisirs, les sorties, l’habillement ou encore les biens durables dont on est déjà équipé. On va reporter les dépenses sur ces postes. Il y a ensuite celles sur lesquelles on ne veut pas rogner : tout ce qui touche aux enfants et à leurs activités. Cela comprend aussi les vacances -surtout quand il y a des enfants-, les travaux de la maison quand on est propriétaire, sans oublier les télécoms et le high-tech, dont le plaisir est associé à une utilisation importante dans les sociétés modernes.

Quid de l’alimentation, qui représente près d’un tiers du budget des ménages ?

Les familles sont coupées en deux sur ce point, dans la mesure où le budget alimentaire sert de variable d’ajustement : certains n’y toucheront pas, quand d’autres chercheront à rogner dessus. Ce qui peut vouloir dire baisser en gamme, prendre de la viande blanche à la place de la viande rouge, par exemple. Ce phénomène, on l’a eu avec l’attrait pour le low cost ou le hard discount. Mais ces derniers temps, on a le sentiment que la tendance s’est inversée.

Les magasins de hard-discount ne cessent, justement, de perdre des parts de marché depuis le début de la crise. Où est la logique ?

L’écart de prix s’est beaucoup réduit sur les grandes marques entre la grande surface et le hard-discount. On privilégie la qualité-sécurité sur l’alimentaire, la qualité-plaisir, la durabilité, pour ne pas être déçu de l’achat. On arbitre moins sur la descente en gamme que sur le circuit de distribution. On veut un bon produit et on va chercher le moyen de l’acheter le moins cher possible.

Avec la crise de 2008, quels sont les Français qui ont modifié leurs habitudes de consommation ?

Il faut relativiser les effets de cette crise. En réalité, les changements dans la consommation sont apparus plus tôt, il y a près de dix ans. Depuis, le ressenti de la crise s’est amplifié. Quant à ceux qui ont le plus modifié leurs habitudes, ce sont ceux qui ont le plus de contraintes budgétaires. J’opère d’ailleurs une distinction entre niveau de contrainte budgétaire et revenus : on peut avoir des revenus corrects et des fins de mois difficiles. Un cadre dont la rémunération comprend une part variable a aussi souffert de la crise et a dû lui aussi revoir un certain nombre de choses.

L’émergence de nouveaux modes de consommation (collaboratives, autopartage, etc.) est-elle liée directement à la crise ?

On sent qu’elle n’y est pas étrangère. Les Français ont l’impression qu’ils ne peuvent plus consommer comme avant : la moitié veut consommer mieux, parmi laquelle un sur deux est prêt à consommer moins pour consommer mieux. Cela amène à se poser des questions sur ces nouveaux modes de consommation, car ces pratiques répondent à une demande de sens, à travers plus qu’un simple acte de consommation -geste pour la planète, etc…-. C’est une dépense qui a un caractère utilitariste. Il est frappant de voir à quelle vitesse se diffusent ces formes de consommation « émergeantes » -car toutes ne sont pas collaboratives-. On sait déjà qu’environ 60% des Français sont engagés de façon significative dans ces nouveaux modes de consommation. Le phénomène est déjà sorti des cercles militants, il n’est pas réservé aux « bobos » parisiens. Et la dimension technologique n’est pas anodine : le web rend ces types de consommations plus faciles. Pour l’autopartage, par exemple, l’offre a révélé une demande.

Est-ce le même raisonnement pour la tendance à se tourner vers les produits d’occasion ?

L’occasion rentre là-dedans. Ça a toujours existé, mais aujourd’hui, elle est considérablement présente. C’est le signe d’une maturation du consommateur : « L’objet n’est pas neuf, mais je fais une économie de 30 à 40% ». C’est une consommation plus responsable.

Comment les comportements de consommation sont-ils appelés à évoluer ?

Il y a un changement du modèle de consommation, mais le point d’arrivée n’est pas net. Ce qui est sûr, c’est que l’on est partis sur du « dur », car la conjoncture ne devrait pas se retourner tout de suite. Dès lors, on devrait conserver (après la crise, ndlr) certains comportements acquis par nécessité, comme la tendance à l’achat de produits d’occasion. L’offre s’étoffe aussi : les plates-formes sur le web, les starts-up qui grossissent… Dans le monde plus « traditionnel », il y a aussi un changement structurel : désormais, les grandes enseignes font de l’occasion et de la location. Cela peut conforter le consommateur dans l’idée que ce sont de bonnes manières de faire.

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