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« Il n’existe aucun exemple concret d’obsolescence programmée »

Si l’obsolescence programmée sera bientôt reconnue juridiquement comme un délit (le projet de loi sur la Transition Energétique sera examiné le 19 mai 2015 à l’Assemblée nationale), son existence fait encore débat. Selon une étude de mars 2014, réalisée par Mediaprism, 92% des consommateurs sont convaincus que les produits électroménagers ou high-tech sont volontairement conçus pour ne pas durer. Pourtant, du côté de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise des énergies (Ademe), l’obsolescence programmée est remise en question. Erwann Fangeat, ingénieur au service produit et efficacité matière de l’Ademe, a accepté de donner son avis sur le sujet à Touslesbudgets.com.

Touslesbudgets : Qu’est-ce que l’obsolescence programmée ? Quand est apparu ce terme ?

Erwann Fangeat :Au sens de l’étude de l’Ademe sur la durée de vie des équipements électriques et électroniques (2012), la notion d’ « obsolescence programmée » dénonce un stratagème par lequel un industriel limiterait sciemment la durée de vie d’un bien. Ce terme est apparu il y a quatre ans suite à un documentaire diffusé par Arte intitulé « Prêt à jeter ».

TLB : Pouvez-vous me présenter ce que la loi sur l’obsolescence programmée a changé ?

E.F. : Il s’agit d’un amendement à la loi sur la transition énergétique. En premier lieu, cela permet de définir clairement ce qu’est l’obsolescence programmée et de faire en sorte qu’elle soit reconnue comme un délit dans le cadre juridique avec une peine allant jusqu’à deux ans d’emprisonnement et 300 000 euros d’amende. C’est un sujet largement débattu par tous il était donc important de le définir.

TLB : Existe-t-il des exemples prouvés d’obsolescence programmée ?

E.F. : Il n’existe aucun exemple concret d’obsolescence programmée car il est difficile à prouver qu’une industrie a limité sciemment la durée de vie d’un produit. Il y a un problème de qualité ou de probabilité mais pas forcément d’obsolescence programmée. Les équipements peuvent tomber en panne sans que cela soit anticipé par les constructeurs. L’Ademe a réalisé une étude économique dans laquelle on constate que les entreprises qui sont dans un contexte de concurrence n’ont pas d’intérêt à faire de l’obsolescence programmée car ils perdraient leurs clients. C’est plus un problème de qualité des produits.

TLB : Serait-ce, alors, un problème de perception du consommateur ?

E.F. : Une autre de nos études porte sur l’audiovisuel. On a constaté que la perception du consommateur, sur la durée de vie des objets est fausse. La durée de vie d’une télévision est de douze ans en moyenne, tandis que les consommateurs pensent qu’elle est de dix ans maximum. On constate une méfiance vis-à-vis des constructeurs, alimentée par les médias. C’est plus un problème de perception.

TLB : Quels sont les produits les plus touchés par cette question ?

E.F. : En trente ans, la durée de vie des produits dans l’électroménager à raccourci d’environ un an, selon une étude du Gifam. Mais parallèlement, les produits sont plus utilisés et plus économiques. On constate un réel progrès technique et environnemental.

TLB : Est-ce intentionnel de la part des constructeurs ou est-ce que cela peut venir du consommateur qui est à la recherche du produit le moins cher possible ?

E.F. : C’est possible, mais ce qui serait d’avantage critiquable ce serait le fait qu’une fois sur deux, en cas de panne le consommateur ne tente pas de réparer son matériel.

TLB : Qu’est-ce que l’obsolescence marketing ? Existe-t-il d’autres formes d’obsolescence ?

E.F. : L’obsolescence marketing concerne surtout les produits high-tech, c’est une problématique qui est liée au désir des consommateurs et aux industriels qui rendent les produits obsolètes trop rapidement. Dans la téléphonie, par exemple les Français changent tous les 18 mois alors qu’un téléphone peut durer 6 ou 7 ans.
Dans les autres obsolescences qui existent, il y a le changement technologique, le passage à la TNT qui a nécessité, pour certains, un changement de télévision. Et l’obsolescence classique, quand les produits arrivent en fin de vie.

TLB : Quelles pourraient être les pistes à creuser pour lutter contre la courte durée de vie d’un produit ?

E.F. : L’une des recommandations faite au gouvernement consiste à indiquer sur le produit sa durée de vie moyenne. Car sans cette information, le consommateur choisira le produit le moins cher, un phénomène qui entraine une baisse de la qualité. Parmi les pistes à creuser, on peut parler du développement de la réparation, comme par exemple le Repair café.

Marine Couderette – © djama – Fotolia.com

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